Le Projet Gelco Design

01/10/2021

© Ville de Tous - K. Ayeb

Un quartier imaginé avec la population

 

Près de la Petite Arche, Bouygues Immobilier va aménager un quartier de 5,2 ha d’ici 2025. Une trentaine de personnes ont participé à des ateliers pour amender le projet, avec la complicité de l’aménageur. Une démarche de co-construction que la municipalité entend multiplier.

 

L’entreprise Gelco Design, spécialisée dans le stockage et la logistique de matériel de salles de bains, a libéré ses locaux du 26 avenue Gustave Eiffel, en déménageant ses bureaux ainsi que son espace de démonstration avenue du Danemark et son entrepôt logistique en Bourgogne.

Depuis 2011, le Plan Local d’Urbanisme a ouvert ce secteur à vocation économique de 5,2 ha à une « mixité fonctionnelle ». D’un commun accord avec la Ville de Tours, Bouygues Immobilier a accepté de verser à la co-construction la programmation économique de leur projet, et l’aménagement des futurs espaces publics. Une partie de ceux-ci initialement réservée aux copropriétés, sera rendue au public : ainsi près de

11 000 m² seront rétrocédés à la Métropole, soit l’équivalent de deux jardins botaniques !

 

SCOPIC, société coopérative nantaise spécialisée dans les démarches associant la population à des projets urbains, a été missionnée par Bouygues Immobilier pour animer les cinq ateliers de co-construction de février à juin (deux en visioconférence, trois en présentiel sur site) avec une trentaine d’habitants, représentants d’entreprises, associations et étudiants.

Michel Hentry © Ville de Tours - F. Lafite

Le bien-être des habitants

 

« Ce projet, nous voulions le faire évoluer à l’aune de notre vision de l’aménagement de la ville en le co-construisant avec la population », rappelle Cathy Savourey, adjointe au maire chargée de l’urbanisme (lire à ce sujet Tours Mag n°206). Annaelle Schaller, adjointe déléguée à la démocratie permanente, ne dit rien de moins : « on ne fera pas la ville de demain sans la population. Il y a eu plusieurs décennies d’urbanisation à Tours nord et autant de grogne des habitants qui se plaignent de ne pas avoir été consultés ou qui indiquent qu’il manque des espaces paysagers dans les projets ». Michel Hentry, président du comité de quartier de Sainte-Radegonde s’est investi car il constate que « depuis plusieurs années, les constructions entament les zones vertes à Tours nord et plus particulièrement à Sainte-Radegonde. Nous voulions participer aux avant-projets pour défendre le bien-être des habitants ».

 

Et de citer le contre-exemple de l’avenue Maginot où « l’intimité des résidents n’est plus respectée ». Il a participé au groupe de réflexion sur le maintien d’une partie (600 m²) de la halle industrielle pour y héberger des activités expérimentales ou associatives. « Il faut choisir entre deux options : un espace à louer pour des activités associatives ponctuelles ou l’occupation pérenne par des ateliers de réparation ou de bricolage ». Ce qu’il retient de la démarche : « il n’y a pas eu de raisonnements utopiques, tout ce qui a été proposé est réalisable ».

Gelco Design © Bouygues Immobilier - Atelier Banchez-Feray

© Ville de Tours - K. Ayeb

Lionel Perrone © Ville de Tours - F. Lafite

Des changements de comportement

 

Lionel Perrone, directeur du centre commercial Auchan et vice-président de l’association l’Arche de Tours nord, qui fédère 170 commerces, évoque : « une démarche novatrice avec un discours rassembleur. Le quartier avait grandi de manière peu cohérente ces vingt dernières années. Le centre commercial a ouvert au milieu des champs et c’est la ville qui est venue se construire autour. Je suis attentif aux futurs commerces pour éviter d’avoir des boutiques identiques et promouvoir d’autres activités de proximité ». Le directeur constate des changements dans le comportement des consommateurs.

 

« La population ne veut plus passer des heures dans d’immenses centres commerciaux. Les habitudes ont changé, 20 % de mes clients viennent sans voiture et les jeunes générations commandent en ligne. Lorsque j’ai refait mon magasin, j’ai accepté de perdre 1 000 m² pour des espaces plus conviviaux. Une démarche également novatrice. Aujourd’hui, je ne le regrette pas ».

© Alexandre Veronneau

Alexandre Veronneau est le directeur de l’agence Val de Loire de Bouygues Immobilier. Il se souvient : « avec la nouvelle municipalité, nous nous sommes accordés sur une expérimentation de co-construction sur les mobilités, sur les espaces verts et les espaces publics sur toute la deuxième tranche du projet en cours d’instruction ».

 

Si Bouygues Immobilier participe à ces démarches expérimentales à Nantes, Lyon ou Paris, « je ne suis pas certain que nous ayons déjà proposé cela, à savoir retirer trois permis de construire représentant 50 % des constructions, pour les rediscuter avec toutes les parties prenantes ». Il évoque des propositions pleines de bon sens : « pour préserver la biodiversité, un expert avait proposé de maintenir des espaces verts existants plutôt que de les supprimer pour les reconstituer plus tard ». Le maintien d’une partie de la halle n’était pas prévu au départ. « C’est forcément plus coûteux que la démolition mais on va y gagner en qualité ».

 

Les professionnels de la construction et de l’urbanisme l’ont compris depuis longtemps : on ne peut plus construire la ville sans y associer ceux qui y vivent. Le 23 juin dernier, Emmanuel Denis et Cathy Savourey les ont rencontrés dans les locaux de la Fédération Française du Bâtiment à Tours nord. Plus de 150 entrepreneurs du département y participaient à distance par visioconférence.

 

« Cette fabrique de la ville, nous ne la feront pas tout seuls et nous avons besoin de vous, de vos innovations, de votre créativité pour lutter contre le réchauffement climatique, les inégalités sociales et territoriales », avait martelé le maire. Les destructions d’emplois et l’augmentation de la pauvreté engendrées par la pandémie de Covid-19 ne lui donnent pas tort. Les dramatiques catastrophes climatiques de l’été en Europe, en Chine ou en Amérique du Nord, non plus.

© Ville de Tours - K. Ayeb